Le jardin, les près, les rues, tout est rouge et vert en ce moment. Les coquelicots (poppy !), les roses, les framboises et autres jolies baies rouges, qui donnent envie de les croquer. Cela ferait de magnifiques photos, pour peu que je ne sois pas derrière l'appareil.
Je m'ennuie souvent en ce moment. J'en prends le temps, et j'aime bien. Pourtant, je devrais travailler un peu, avec le Bac qui approche. Mais j'aime trop m'allonger sur le lit et laisser mes pensées s'en aller très loin.
Je pars a Belvédère avec Toubib, dans les tranchées ou je vois le renouveau après les batailles, je pars dans des contrées vertes et avec de beaux lacs. J'imagine le Canada, et tous ces pays froids ou j'aimerai aller et vivre.
J'écoute beaucoup Tri Yann. Les instruments anciens s'accordent bien à ma mélancolie. Une voix douce, un lit aux douces odeurs de lessive, l'envie de danser un peu. 1, 2, 3, 4, avancer, reculer, pas chassé, tour, avancer, prendre la main d'un cavalier, et laisser ma voix s'échapper. La cornemuse et les violons. La lyre délicate et le flûtiau.
Les robes en dentelles me rappellent que j'ai toujours aimé danser, que j'ai toujours était en marge de mon époque. Née trop tard, trop loin.
Que les plumes me manquent, que les robes corsetées m'iraient bien, que ne puis-je porter un chapeau de soie. J'aimerai recevoir des lettres magnifiques, passionnées, et de beaux rubans de guerre, de mon mari, de mon fils.
"J'ai reçu tes milles lettres par le rossignol chantant, je t'écrivais moins peut être : je t'envoyais des rubans"
"Ma mère si je meure en combattant, je vous enverrais ce beau ruban et vous le bouterez à votre fuseau en souvenir du gars Pelot"
Tri Yann
Et puis boire toujours du vin, ne faire qu'éduquer mes enfants, devenir marraine de guerre. Que mes jupons volent, je sais les danses des bals de ces temps anciens. Que mes cheveux restent attachés, je suis fille de bonne famille, fille d'instituteur. Que mon sourire de femme jamais ne disparaisse, car c'est lui qui soutient l'effort de guerre.
J'aimerai, oui j'aimerai contacter cet auteur de bande-dessinée qui s'appelle Drouin. Lui dire
"Monsieur, dans mon village, il y a la tombe d'un soldat écrivain qui est mort pour des gens qu'il ne connaissait pas. Sa tombe est toujours vide, toujours triste, et si, oui, si seulement vous étiez de ces descendants, j'adorerai que vous y déposiez une jolie gerbe de fleurs délicates. Ne le laissez pas, lui qui est mort pour ma vie."
J'aimerai quitter ce village aussi. Repartir vers Praha la Magnifique, manger à nouveau ces succulents plats tchèques, profiter de la pluie de là-bas, et revoir la superbe horloge astronomique, Notre-Dame de Lorette dont la beauté laisse sans voix, le pont majestueux aux si nombreuses statues... Et puis, porter le costume traditionnel qui est si beau.
Que suis-je née en France et au XXIeme siècle ?
